Écritures des Indes : Inde, Bangladesh, Indochine, Insulinde
Résumé de la conférence du lundi 4 mars à 18h de M. Michel PRUN, spécialiste du sanscrit, salle Osète, Espace Duranti ,
Présentation langues et écritures des Indes
La zone de diffusion de la civilisation indienne est très étendue, concerne plusieurs états actuels et est le siège d'un grand nombre de langues : 150 langues parlées par plus de 10 000 locuteurs pour la seule Union Indienne. La pratique et le statut de ces langues sont très différents et les états ont des politiques linguistiques variables.
La diversité des langues se retrouve dans les écritures utilisées dans ce secteur, écritures qui ont la particularité, pour la presque totalité d'entre elles, de provenir d'un même ancêtre. La présentation a pour but d'approcher la répartition de différentes langues, d'exposer le fonctionnement des écritures et de montrer des exemples tant anciens que modernes.
Résumé de la conférence
Le terme « Les Indes » désigne dans ce texte l'espace compris entre, à l'ouest, l'Afghanistan, à l'est, l'Indochine et l'Insulinde, et est borné au nord par la chaîne himalayenne. Dans cet espace, les langues employées sont très nombreuses (et il paraît préférable de ne pas avancer de nombre pour l'ensemble de la zone car, la seule Union Indienne présente plus de cent cinquante langues ayant chacune plus de 10 000 locuteurs !) et, fait inattentu, les écritures sont elles aussi très nombreuses, même si elles proviennent presque toutes de l'évolution d'une même écriture intiale. La page de titre présente la translittération du même mot sanskrit dans une douzaine de ces écritures.
Les langues.
Il ne s'agit pas de faire la liste de toutes les langues parlées dans ce secteur mais de se limiter aux seules familles illustrées de quelques exemples. La première famille est contituée d'un seul membre qui est le bourouchaski (87 000 locuteurs, nombre de 2000 selon Wikipédia, article Bourouchaski.), langue isolée ne pouvant être rapprochée d'aucune autre, et qui se trouve dans la partie supérieure de trois vallées himlayennes du Pakistan.
Le monde indien présente des langues regroupées sous le nom d'austro-asiatique, essentiellement dans l'est du domaine. On suppose que ces langues sont autochtones dans le secteur. En Union Indienne elles concernent 9 000 000 locuteurs, souvent en petites communautés à la marge de la civilisation indienne. La plus importante numériquement est le santali (6 000 000 de locuteurs en Inde, Bengladesh, Népal, Bhoutan).
En péninsule indochinoise la famille austro-asiatique est représentée par plusieurs langues dont le Khmer au Cambodge et le Viet-Namien.
Le groupe des langues tibéto-birmanes (branche de la famille sino-tibétaine) est représenté par le tibétain ou des langues proches, au Tibet et sur ses marges dans le domaine himalayen. Elle présente plusieurs idiomes de la péninsule indochinoise dont le birman, généralement le plus connu car étroitement lié à l'état de Myanmar (Birmanie).
La famille des langues dravidiennes est spécifique du sud de la péninsule indienne, avec des langues d'état (le tamil en Tamilnadu, le malayalam en Kérala, le kannada en Karnataka, le télougou en Andhrapradesh et en Télengana) ou des langues numériquement plus limitées plus au nord en Inde. Le brahoui est la langue d'une communauté importante au Pakistan (2 000 000) et de communautés éparses en Afghanistan, Iran, Turkménistan, Bangladesh (300 000 pour ces trois pays.)
La branche des langues iraniennes présente des locuteurs dans l'ouest du Pakistan (et bien sûr en Afghanistan, Iran, etc.) essentiellement sous la forme de deux langues le baloutchi et le pachtoun. Ce rameau iranien est regroupé dans la branche indo-iranienne de la famille indo-européenne, avec le rameau indo-aryen qui concerne le nord et le centre de l'Union Iindienne ainsi que le Bengladesh. Ce rameau qui concerne 1,5 milliard de locuteurs, regroupe des langues majeures telles que le hindi, le ourdou qui est la forme du précédent influencée par l'arabo-perse, le bengalais (ou bengali), le gujrati, le marathi, le bihari, l'oriya, le penjabi, le sindhi (ces deux langues sont aussi parlées dans l'est du Pakistan), l'assamais à l'est de l'Union indienne, le népali au Népal, le cingalais à Ceylan et diverses formes « montagnardes » regroupées sous le nom de pahari sur le bord de l'Himalaya.
Les états ont des politiques différentes. En Inde, les langues de l'Union sont le hindi et l'anglais, mais une vingtaine d'autres langues sont reconnues (Assamais , Bengali , Bodo, Dogri, Gujarati, Hindi, Kannada, Kashmiri, Konkani, Maithili, Malayalam, Manipouri, Marathi, Népalais, Oriya, Panjabi, Ourdou, Sanskrit, Santali, Sindhi, Tamoul, Télougou). Chacun des états fédérés choisit sa ou ses langues officielles. Par exemple en Andhrapradesh la langue officielle est le télougou, au Bihar, c'est le hindi, en Arunachal Pradesh c'est l'anglais. En pratique un territoire présente souvent plusieurs groupes de locuteurs et le cas de la ville de Mysore est donné en exemple. Au Pakistan, la langue officielle est l'ourdou, langue maternelle de seulement 7 à 8 % de la population. Au Bengladesh c'est le bengali et à Ceylan le cingalais et le tamoul. En Indochine, les limites des états coïncident rarement avec celles des groupes linguistiques et les politiques linguistiques très variables.
Les écritures
Parmi les différents types d'écriture (« idéographique », alphabétique, syllabique...), les écritures indiennes présentent une particularité. Elles sont basées sur un alphasyllabaire qui consiste en des signes représentant des syllabes dotées d'une voyelle par défaut et d'autres signes, souvent annexes, modifiant, remplaçant ou supprimant cette voyelle par défaut. Ainsi l'écriture dévanagari qui est la plus utilisée dans le monde indien présente un « alphabet » composé de consonnes accompagnées de la voyelle a brève.
La phonologie du sanskrit et de plusieurs langues indo-aryennes conduit à un grand nombre de consonnes avec opposition non seulement des sourdes (ex. : k) et des sonores (ex : g) mais aussi des non aspirées (k) et des aspirées (kh), l'existence d'une série inconnue en France (les cérébrales, notées avec un point souscrit ṭ suivant la convention de translittération décidée par les indianistes réunis en congrès à la fin du XIXe siècle). Lorsqu'on veut représenter une syllabe contenant une autre voyelle que le a bref, on ajoute un signe comme dans l'exemple du tableau ci-dessous où la lettre représentant le son k est suivie des voyelles a bref, a long (notée ā), i bref, i long (ī), u bref, u long (ū), r voyelle bref (qu'on rencontre par exemple ne croate, ṛ), r voyelle long (ṝ), e, ai, o, au (ai et au étant des diphtongues tendant vers et o ouvert), ce qui donne :
à lire : ka, kā, ki, kī, ku, kū, kṛ,kṝ, ké, kai, ko, kau.
Les voyelles situées en début de mot présentent une forme particulière :
Un exemple de texte en dévanagari : la première strophe de la Bhagavadgītā :
ce qui se lit :
dharmakṣtre kurukṣetre samavetā yuyutsavaḥ
māmakāḥ pāṇḍācchaiva kimakurvata sañjaya.
et signifie (traduction par Anne-Marie Esnoul et Olivier Lacombe, Librairie Arthème Fayard, Points, Inédit, Sagesses) :
« Rassemblés au champ sacré, au Kurukshetra, enragés à combattre, qu'ont fait, ô Sanjaya, mes gens et ceux de Pându ? »
Cette forme sera confrontée à celle obtenue avec différentes écritures mais en conservant la même langue, le sanskrit (grâce au site sanskritdocuments.org et à son logiciel de translittération).
Plusieurs exemples de textes en dévanagari, anciens ou modernes, sont présentés, en particulier le magnifique rouleau contenant le Bhāgavatapuraṇa de la Bibliothèque Nationale de France (gallica.bnf.fr / . Sanscrit 477).
L'écriture dévanagari provient de l'ancêtre bien identifié qu'est l'écriture brahmi connue car elle a servi à graver sur des stèles les édits d'Ashoka, le célèbre empereur Maurya (milieu du troisième siècle avant l'ère commune) annonçant la fin du recours à la force. Il s'agit d'une écriture très géométrique, avec des variantes nombreuses. Son origine est inconnue, certains proposent l'écriture de la civilisation harapéenne, d'autres l'écriture araméenne, provenant elle-même d'un proto-sémitique qui a donné par ailleurs les écritures phénicienne, grecque et latine. Un article récent (The hybrid origin of Brahmi script from aramaic, phoenician and greek letters de Karan Damodaram Pillai, Indialogs Vol. 10 2023) propose une création par des lettrés connaissant araméen, phénicien et grec. Cette écriture brahmi a très certainement été élaborée par des grammairiens de tradition indienne car elle reflète l'analyse linguistique telle que contenue dans la Grammaire de Pāṇini dont l'ouvrage (environ Ve siècle avant l'ère commune, unique au monde à cette époque) est une référence incontournable.
La brahmi s'est diversifiée en deux branches : celle du nord dite Gupta et celle du sud, Pallava, du nom de dynasties.
Le résumé ci-dessous permet l'évolution de ces écritures par la comparaison de la même syllabe ka :
1 devanagari ; 2 bengali ; 3 gujarati ; 4 gurmukhi ; 5 oriya ; 6 tibétain ; 7 kannada ; 8 malalayam ; 9 sinhala ; 10 tamil ; 11 telugu ; 12 khmer ; 13 lao ; 14 birman ; 15 thai.
Pour chacune des écritures présentées, le texte de la première strophe de la Bhagavadgītā permet de la comparer à la dévanâgari.
Des cartes visualisent le voyage de ces écritures dans toutes l'Asie et des exemples manuscrits ou imprimés, anciens ou actuels, sont présentés pour la brahmi, l'écriture harapéenne, la karoshti, la gupta, la siddham, la gujrati, la sylheti-nagri, la gurmukhi, la dogri, la bengali., la maithili, l'odia, la ranjana, le soyombo, l'écriture tibétaine, la bhaiksuki, les écritures tokharienne, tamile, pallava, grantha, malyalam, khmere, thailandaise, laotienne, balinaise, javanaise, cinghalaise, kannada, telougou, birmane.
Pour terminer, trois écritures exotiques pour l'Inde : l'avestique, l'arabo-perse (en particulier pour noter l'ourdou et le sindhi) et l'écriture latine, souvent utilisée avec l'orthographe anglaise.
Les écritures indiennes, surtout la dévanagari, est utilisée pour son côté étrange à des utilisations diverses (graffiti, tatouages, emballages) et fait l'objet d'une « contrefaçon » en particulier sur les enseignes de restaurants indiens.
(1) Source : Wikipédia, article Bourouchaski.
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